Le développement de Lyon – comme celui de tous les centres industriels – a nécessité un fort apport de populations venant d’ailleurs.
L’esclavage, l’exode rural, les empires coloniaux sont des composantes de presque toutes les histoires de développement de grands centres économiques et urbains.
Lyon a absorbé des vagues successives de migrants qui ont toujours été indispensable à son développement.
Ce fut longtemps des migrations à l’intérieur de l’espace français, migrations saisonnières parfois, définitives d’autres fois.
Ainsi des paysans du massif central venaient après les moissons travailler sur les chantiers lyonnais.
Des ardéchois, des foréziens sont venus nombreux travailler dans les usines textiles, mécaniques, chimiques de Lyon… Des jeunes femmes se plaçaient comme employées de maison et dans les commerces.
Chez mes parents, Célie Maneval, fille d’agriculteurs des Vastres, à côté de Fay sur Lignon en Haute-Loire, a été bonne à tout faire pendant une quinzaine d’années. Elle a été quelqu’un
d’important dans ma vie d’enfant, bien sûr matériellement, mais aussi affectivement.
Son frère Ernest était aussi à Lyon, ouvrier dans une usine.
L’industrie lyonnaise avait toujours besoin de plus de main d’œuvre, des italiens, des suisses, des espagnols, des portugais puis des maghrébins et des africains de l’Afrique occidentale et de l’Afrique équatoriale françaises sont venus faire tourner les machines.
Ces travailleurs immigrés ont vécu dans les bidonvilles qui ont été érigés tout le tour de l'agglomération, à Gerland, à Vénissieux, à Vaulx en Velin, à Villeurbanne,...
Dans Lyon les quartiers populaires ont été habités par des vagues successives d'arrivants, et le quartier de la place du Pont
et de la Guillotière est l'endroit proche du cœur de la ville où cette présence est visible.
Place du Pont
Le pont de la Guillotière a longtemps été l'unique pont de Lyon sur le Rhône, ce qui
donnait au faubourg de la Guillotière le statut d'unique « porte d'entrée » Est de la ville. Ce rôle a persisté dans le temps, et aujourd'hui, les populations immigrées y sont
nombreuses, et suivent le cours des grandes vagues d'immigration : après l'installation des Italiens au XIXe siècle, ce seront les populations originaires du Maghreb,
de Turquie ou encore d'Asie qui s'installeront ici,
témoignage de cette histoire, la présence de la grande épicerie Bahadourian fondée par un Arménien. Autour des rues Passet et Pasteur se trouve le
petit quartier chinois de Lyon.
Fruit des évolutions sociales, récentes, ces populations ont
actuellement tendance à laisser la place à celles d'Europe de l'Est. D'autre part, le quartier perd un peu ce rôle, parce qu'il suit la mode de retour des populations des classes moyennes
(habitant auparavant dans des pavillons à la périphérie), dans les centres villes, la proximité des universités favorisant aussi l'installation d'étudiants. De nombreux bâtiments y sont donc
actuellement rénovés ou reconstruits pour accueillir ces classes sociales plus aisées.
Le Gone du Chaâba est un roman autobiographique d'Azouz Begag (Éditions du Seuil, 1986).
Le gone du Chaâba raconte l'histoire d'Azouz, un jeune algérien. Il habite au Chaâba, un bidonville à côté de Lyon. Il vit dans une misérable habitation, sans eau ni électricité, à côté d'autres familles arabes. Azouz a un grand frère Moustaf, et une grande sœur Zohra. Même s'il travaille bien à l'école, il est obligé de travailler au marché pour rapporter un peu d'argent à sa famille. À l'école, Azouz se met au premier rang et est attentif à toutes les remarques de son maître. Malgrès les coups répétitifs de son père, il a la deuxième meilleure note de la classe lors de la remise d'une composition. Il est très content, mais bientôt, certains arabes de sa classe qui se moquent de l'école le rejettent en ne le considérant plus comme un arabe. Contrairement à ses amis, son père est très fier de lui et lui répète sans cesse qu'il doit bien travailler à l'école pour qu'il puisse avoir un bon travail "comme les français", contrairement à lui, un maçon. Plus tard, son oncle, maudit par le père d'Azouz, qui vit également au Chaâba, va se faire arrêter par la police car il est le responsable d'un trafic de viande de mouton. En fait, c'est Azouz qui le dénonce, croyant qu'il aidait sa famille. À cause de cet incident, plusieurs familles vont partir du Chaâba mais le père d'Azouz, Bouzid, refuse de partir. Pourtant, un matin, les Bouchaoui, une ancienne famille du Chaâba qui habite maintenant dans un appartement à Lyon revient au Chaâba en expliquant au père d'Azouz que la vie dans un appartement est bien meilleure qu'au Chaâba. Bouchaoui a même trouvé un appartement pour la famille d'Azouz, pour les remercier de tout ce que Bouzid avait fait pour eux. Finalement, après les "Je veux déménager" répétitifs du petit Bouzidi, le père d'Azouz accepte et les Begag emménagent dans leur appartement à Lyon. Azouz est émerveillé par l'eau courante, les toilettes propres, l'électricité, et même une télévision ! Au début, il n'a pas trop d'amis mais il rencontre ensuite un autre enfant du Chaâba. Azouz passe une mauvaise année de CM2 car sa maîtresse ne l'aime pas. Après le CM2, il entre en 6e au lycée Saint-Exupéry. Son professeur de français, M. Loubon, est un pied-noir qui a vécu en Algérie. Il va l'aider à travailler et une grande amitié va se créer entre eux, ils parlent ensemble de l'Algérie, et s'apprennent l'un à l'autre des mots arabes. Il lui a même offert un livre ! Pourtant, à la fin de l'histoire, alors qu'ils sont bien dans leur appartement, ils sont contraints de déménager.