En Bourgogne

Avec Joseph Roty dans sa cave de Gevrey-Chambertin
Avec Joseph Roty dans sa cave de Gevrey-Chambertin

C'est en Bourgogne que j'ai commencé à m'intéresser réellement au vin. A l'occasion de voyages entre Paris et Lyon, j'ai eu envie de goûter des vins différents de ceux que j'achetais jusqu'alors. Armé d'un guide des vins, je ne sais plus lequel, je suis allé taper à la porte de quelques viticulteurs à Pommard, un nom mythique, et à Nuits Saint Georges.

Tout ce que j'ai goûté était bon. C'est normal d'ailleurs, l'usage d'un guide permet souvent de passer à l'écart des pires producteurs, il y en a, et d'éviter les catastrophes. J'ai acheté ce que mon budget, bien modeste, et la place disponible dans ma voiture, petite, me permettaient d'emporter. 

Nous avons vite perçu que ces achats étaient encourageants mais que nous pouvions sans doute faire mieux.

Je me suis mis "au travail". J'ai commencé par regarder de près les guides dont je pouvais disposer et assez rapidement j'ai pu éliminer ceux qui me semblaient plus ou moins douteux, trop vagues dans leurs sélections et pratiquant visiblement le "copinage", voir que l'on pouvait soupçonner de corruption.

Ensuite j'ai pu croiser les informations et établir une liste des viticulteurs à essayer de connaître. Ceux qui bénéficiaient d'appréciations positives et concordantes dans les publications les plus fiables.

Et avec Annie, nous avons décidé de passer une semaine de nos prochaines vacances en Bourgogne.

Nous avons pris contact avec les viticulteurs sélectionnés, convenu de rendez-vous et nous avons commencé à goûter des vins du matin au soir... puis nous avons confronté nos appréciations et acheté nos flacons préférés. 

25 ans plus tard il y a des producteurs que nous sommes retournés voir, que nous avons suivis, d'autres que nous ne connaissons plus, mais il reste des souvenirs de personnes particulièrement attachantes.

Joseph Roty

J'avais lu que Joseph Roty avait un "énorme talent", mais qu'il avait parfois un caractère rugueux voir ombrageux et que ce n'était pas toujours facile d'être reçu.

Quand nous sommes arrivés c'est Madame Roty qui nous a reçu et qui a commencé à nous faire goûter des vins dans l'entrepôt d'expédition.

 

Certes, c'était bon, je me souviens en particulier du Gevrey-Chambertin "les Fontenys" dont nous avons commandé plusieurs fois des cartons et dont il ne nous reste rien.

 

Mais lorsque Joseph Roty est arrivé, tout à changé.

  

Le personnage rugueux s'est révélé être un homme jovial, chaleureux, racontant une foule d'anecdotes. Nous sommes descendus dans la cave, nous avons goûté les vins en cours d'élevage à la pipette, tirés des barriques.

Avec Madame Roty, je goûte à la pipette
Avec Madame Roty, je goûte à la pipette
Joseph Roty avec Annie dans la cave
Joseph Roty avec Annie dans la cave

Joseph Roty nous a parlé de ses vins, mais aussi beaucoup de ceux qu'il n'aimait pas, de la Chatelaine de Gevrey, royaliste caricaturale, des Bordelais "qui ne font pas du vin mais de la chimie avec leurs assemblages"... 


Mais Joseph Roty allait au bout de ses convictions. Nous avons aperçu sur un tarif qu'il proposait un Bourgogne casher du millésime 1989. 


Il nous a expliqué que lors des élections récentes, je pense qu'il s'agissait des législatives de 1988, le Front National avait obtenu plus de 15% des voix à Gevrey-Chambertin.

Furieux de ce résultat, il avait réfléchi à ce qu'il pouvait faire pour signifier publiquement son indignation.

Il est allé voir le rabbin de Dijon et il a proposé de faire une cuvée casher lors de la vendange suivante.

Le rabbin, et j'imagine la communauté juive dijonnaise, ont été séduits par l'idée ; il a été convenu que Joseph Roty dirigerai les opérations de la vendange et de la vinification, mais que ce seraient des membres de la communauté qui effectueraient les tâches en contact avec le raisin et avec le vin sous la surveillance du rabbin.


Et c'est ainsi que nous avons eu un très bon Bourgogne casher....  

Lors de cette première visite, nous étions arrivés chez Joseph Roty à 14 heures, et nous n'arrivions pas à repartir à 20 heures 30. Nos autres rendez-vous de l'après midi avaient été oubliés...

Malheureusement Joseph Roty était malade. Il est mort en 2008.

A son décès, ses fils Philippe et Pierre-Jean ont repris l’exploitation : ils représentent la 11e génération de vignerons de la famille. Les frères Roty disposent d’un formidable patrimoine de vignes de pinot noir, à Gevrey-Chambertin et à Marsannay. Certains des plus vieux ceps, situés en appellation Charmes-Chambertin, ont été plantés en 1881, ce qui permet au domaine d’apposer la mention « Très vieilles vignes » sur l’étiquette de ce grand cru.

Je n'ai pas eu l'occasion de déguster les vins des fils de Joseph Roty.

Jean-Noël Gagnard

A Chassagne-Montrachet nous avons été reçu plusieurs fois par Jean-Noël Gagnard puis par sa fille Caroline Lestimé qui a pris la direction du Domaine depuis 1989.

Jean-Noël Gagnard nous a permis de déguster de très grands vins, des vins riches, puissants, corpulents même, mais avec de l'élégance. 

Caroline Lestimé poursuit le travail de son père en faisant évoluer le domaine vers de la viticulture biologique.

La Bourgogne est riche de vignerons

Nous avons rencontré d'autres vignerons au fil de ces années ; il y a maintenant bien longtemps Arnaud de Gramont, du Domaine Marchard de Gramont était venu à Créteil faire déguster une partie de ses vins à la librairie Chroniques...


J'ai beaucoup aimé les vins du Domaine Etienne Sauzet. Des Puligny-Montrachet dans tous les climats de cette magnifique appellation, des Grands crus de Montrachet, Chevalier... malheureusement je ne dispose pas des moyens de renouveler mes commandes.

 

Plus récemment nous sommes allés goûter et acheter des vins chez de jeunes viticulteurs qui ont repris, dynamisé, converti en bio leur domaine familiale, et produisent des vins de qualité à des prix raisonnables.

Un restaurant étonnant

C'est un viticulteur qui nous avait indiqué, il y a longtemps, un restaurant hors du commun.

C'était à Flagey-Echezeaux sur la place de l'église, le café-tabac du village. On entrait par le café-comptoir où des consommateurs buvaient leur apéro au comptoir et l'on accédait à la salle de restaurant, par une petite porte, et l'on se trouvait dans un mobilier bourgeois un peu suranné, des couverts à l'avenant, de grands verres.

Nous y avons mangé une cuisine classique de haute volée, digne d'un restaurant étoilé, à un prix de petit bistrot.

Ce qui était également surprenant, c'est qu'au fil du repas et des allez et venues de la serveuse qui devait être la femme du chef, on entendait les bruits d'une engueulade perpétuelle entre les tenanciers du lieu, ce qui ne semblait ni surprendre ni émouvoir les habitués.

Quand le repas fut terminé, nous étions rassasiés et comblés, nous sommes repassés vers le comptoir pour payer l’addition et là nous avons vu le chef avec son tablier maculé des traces de son travail de nombreuses journées et des cheveux faisant penser à un personnage des chansons de Pierre Perret ou des romans de Frédéric Dard.

Mais à part avec sa femme Monsieur Robert Losset avait l'air sympathique. On nous a dit qu'il avait été chef à bord du paquebot "France". 

Nous avons voulu y retourner il y a quelques années. Le restaurant a été vendu et c'est devenu un restaurant gastronomique plus classique. (Restaurant Simon)

 

Restaurant "Le Charlemagne"

A Pernand-Vergelesses, Laurent Peugeot fait de la cuisine franco-japonaise, souvent très belle, souvent très bonne, parfois un peu gadget, mais c'est globalement très bien. Il a obtenu une étoile Michelin. Nous y avons dîné plusieurs fois et déjeuné lors d'un autre voyage.

Le décor est beau avec la salle donnant sur les coteaux de Corton-Charlemagne.

Laurent Peugeot
Laurent Peugeot